Homélie du 6e dimanche du Temps ordinaire B 15.

La première lecture nous a rappelé quelle était la situation des lépreux au regard de la loi d’Israël. Au temps de Jésus, la lèpre était une maladie réputée contagieuse devant laquelle on était démuni...Celui qui en était atteint représentait une menace mortelle pour sa famille et son village...Pour toute sécurité, il devait vivre à l’écart et crier « Impur ! Impur ! » pour que les bien portants s’éloignent. Nous comprenons la détresse de notre lépreux d’aujourd’hui. Il franchit un interdit pour s’approcher de Jésus et le supplier « Si tu veux, tu peux me purifier ». Il croit que la force de vie émanant de Jésus peut l’emporter sur la force de mort qui est en lui...Jésus lui-même, à son tour, franchit un interdit...alors que selon la Loi il ne devrait pas le faire il touche le lépreux au risque de se rendre impur et d’être lui-même exclu...Mais il est poussé par un amour qui prend le dessus sur la Loi...Devant le lépreux il est bouleversé, profondément remué... Il a dans le cœur un immense amour et un immense désir de faire reculer le mal et la souffrance qui brisent l’homme.

Cela fait partie de sa mission. Il est l’amour en personne au milieu des hommes souffrants. Ce n’est pas au nom de la Loi qu’il agit mais au nom de l’amour. Il ne voit pas un lépreux mais un homme à libérer. Habituellement la contagion va dans le mauvais sens : le mal se communique. Dans notre évangile d’aujourd’hui il y a une inversion de la contagion...au lieu d’aller de l’homme malade vers l’homme sain pour le corrompre...elle va de l’homme sain, Jésus, vers le malade pour le guérir...la force de vie émanant de Jésus l’emporte sur la force de mort qui émane du lépreux....Nous avons une scène analogue un autre jour...une femme, veuve, conduit son fils unique ,mort, au cimetière...c’est le cortège de la mort...arrive en sens inverse Jésus et les siens...le cortège de la vie...Jésus rend la vie au jeune homme, le cortège da la vie l’emporte.

Nous le savons...chaque guérison accomplie par Jésus est une parabole en acte qui dit sa mission : lorsqu’il guérit un sourd c’est pour dire qu’il ouvre le cœur à une révélation profonde...lorsqu’il guérit un aveugle c’est pour signifier qu’il donne un regard nouveau...lorsqu’il guérit un boiteux ou un paralysé c’est pour montrer qu’il vient remettre l’homme debout et en marche pour qu’il avance sur un chemin nouveau...lorsqu’il ressuscite un mort c’est pour enseigner qu’il veut donner une vie nouvelle et éternelle... Au temps de Jésus la lèpre était signe d’un mal intérieur...on pensait qu’elle venait d’un désordre intérieur, le péché...le lépreux ou quelqu’un de sa parenté, pensait-on, avait gravement péché...Dans le contexte culturel du temps de Jésus le lépreux évoque tout homme atteint de la lèpre intérieure du péché...lèpre qui rend les hommes laids et les empêche d’être heureux...

L’évangile que nous venons de recevoir nous parle donc de notre histoire personnelle et de l’histoire de l’humanité. La lèpre du péché nous atteint. Il nous faut le reconnaître avec humilité en nous ouvrant à l’amour du Seigneur. Devant notre misère il est toujours « pris de compassion » et vient nous communiquer sa sainteté...Tel est sens ultime de la guérison du lépreux ! Par la rencontre assidue de Jésus nous rendons possible une progressive contagion de sa vie venant purifier et renouveler la nôtre. Le Seigneur est l’adversaire de notre mal intérieur qu’est le péché, non pour nous en punir mais pour nous en guérir. C’est pour que nous ne perdions pas cela de vue que la prière centrale des évangiles, le Notre Père, nous fait demander « Délivre-nous du mal » Habituellement la contagion va dans le mauvais sens...le mal se communique...le monde dans lequel nous vivons, et que nous devons aimer avec le Seigneur, est souvent marqué par des aspects négatifs...ne laissons pas leur contagion nous gagner...mais soyons tellement imprégnés du Christ que la contagion de la sainteté qui vient de lui gagne nos proches. Nous avons cette mission : transmettre la sainteté de la vie de Jésus en en vivant fortement. Etre contagieux de la sainteté de Jésus : Quelle mission ! La lèpre au temps de Jésus excluait de la communauté des hommes. C’était un ainsi chez nous au moyen-âge ! Jésus, après avoir guéri le lépreux l’envoie faire constater sa guérison par un prêtre pour que, sa guérison constatée, il soit ré-introduit dans la communauté...Jésus est celui qui guérit intérieurement...il est aussi celui qui, indigné par l’exclusion, veut absolument ré-intégrer dans la communauté humaine ceux qui en sont exclus....qui veut absolument abattre les murs qui séparent et créer la fraternité entre les hommes...Jésus menacé d’exclusion devient le centre d’un nouveau rassemblement... « De partout on venait à lui » vient de nous dire l’évangile.

Les premiers chrétiens avaient très tôt bien compris le message, eux qui rassemblaient dans leurs communautés des hommes libres et des esclaves, des citoyens romains et des barbares...Aujourd’hui nous sommes le cœur et les mains de Jésus pour, avec lui, construire un monde d’amour, de paix où il n’y a plus d’exclusions mais une grande communion fraternelle. Avec la confiance du lépreux disons à Jésus « Si tu veux tu peux me purifier »...me purifier de la lèpre de mon péché...me communiquer ta sainteté...faire de chacun de nous des bâtisseurs d’une humanité réconciliée.

Père Michel Marie.

Se purifier de la lèpre du péché.
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