"Sa Mère retenait tous ces événements dans son cœur" Luc 2,51
12 août 2017« SA
Il est manifeste dans toutes les cultures et régions du monde que la naissance d’un enfant est toujours un motif bouleversant d’émotions fortes. La venue en ce monde de Notre Seigneur Jésus a été à la fois un événement majeur et un avènement salvateur. En effet de l’Annonce faite à sa Mère (Lc1,26-38), la Sainte Vierge jusqu’ à sa Résurrection en passant par sa Sainte Passion (Mc14,32),de nombreux épisodes étonnants, de multiples actes inattendus, de puissantes paroles ont accompagné la vie de Jésus et de ses parents. (Luc2, 33)
C’est au cœur de ces paroles que plonge l’évangéliste saint Luc pour faire remonter quelques pépites comme les prophéties de Siméon au temple : « Cet enfant est là pour la chute ou le relèvement de beaucoup en Israël et pour être un signe contesté -et toi-même un glaive te transpercera l’âme. » (Lc2, 34) C’est encore au registre de ces bouleversements qu’il faut inscrire les paroles de Jésus au Temple, lorsque, après trois jours de recherche, ses parents le retrouvent assis au milieu des maîtres. Jésus répond à ses parents : « Pourquoi donc me cherchiez-vous ? Ne saviez-vous pas que je me dois aux affaires de mon Père ?»(Lc2, 49) Ici se situe le contexte scripturaire dans lequel nous lisons ce passage plus haut, mentionné : « Sa Mère retenait tous ces événements dans son cœur. » Nous citons ici la Traduction Œcuménique de la BIBLE. (TOB) Il faut préciser que nous ne citons pas l’autre verset qui lui ressemble et le rappelle presque mot pour mot mais qui ajoute une autre mention en affirmant : « Quant à Marie, elle retenait tous ces événements en cherchant leur sens. » (Luc 2,19) La version bien nommée « Traduction de Jérusalem », rend ce verset avec ces mots : « Sa mère gardait toutes ces choses en son cœur. » (Lc3, 51) Un éclairage nous est déjà donné par cette version. Elle montre que le verbe « retenir » dans son cœur, signifie « garder » dans la foi la parole qu’on reçoit.
Il ne s’agit donc pas d’une simple remémoration. Encore moins d’une rumination de pensées ou de souvenirs sans issue sur des bribes de notre vie. Il est là question de laisser se décanter progressivement en soi des événements fort significatifs de la vie dont la foi sait faire une lecture adéquate et féconde. Cette attitude de la Sainte Vierge rejoint celle que Dieu lui-même demandait à son peuple Israël lorsqu’il lui avait communiqué la Loi. MOÏSE dit au peuple de la part du Seigneur:« Que ces paroles que je te dicte aujourd’hui restent dans ton cœur.» (Dt6, 6)
Toute la Sainte Bible insiste énormément sur l’importance du cœur. Salomon ne conseillait-il pas déjà dans le livre des proverbes : « Garde ton cœur en toute vigilance, car de lui dépendent les limites de la vie !» (Pr4, 23)
Il n’est point superflu de préciser que le cœur a plusieurs connotations dans les Saintes Écritures en général et dans le Nouveau Testament en particulier. En effet, de l’hébreu « léb », traduit par « Kardia » en grec, le coeur est certes un organe physique aux fonctions physiologiques indispensables mais il est davantage.
Ordinairement, le Cœur a une signification métaphorique : Il est considéré comme une source cachée en chacun.il est le lieu de diverses manifestations profondes de l’homme. Il est à l’opposé de la face ou du visage qui peut laisser trahir les émotions. Dans ce sens, on comprend les exhortations et critiques des prophètes comme Isaïe ou Élie : « Oracle du Seigneur. Ce peuple m’honore des lèvres, mais son cœur est loin de moi.» (Is29, 13/Ps78).
Par ailleurs le cœur peut avoir une signification éthique. Il est ainsi le lieu de la conscience morale propre à chaque personne. Dans ce sens le cœur est comme le grand Livre invisible et intérieur sur lequel reste gravée « la loi non écrite. » L’Apôtre saint Paul l’explique largement dans sa belle épître aux Romains quand il aborde l’épineuse question de la justice de Dieu et de, celles et ceux qui n’ont pas connu ou reconnu l’Évangile du Christ. (Rm2, 14) Dans son lumineux enseignement sur les traditions du « pur et impur », Jésus parle aussi du cœur comme sanctuaire de la conscience et lieu de décisions vitales dans la relation aux autres, aux choses et au monde. (Mt15, 1-20/Mc7, 19, 21)
Enfin le cœur dans sa signification spirituelle est synonyme de l’âme.
C’est le lieu de la rencontre avec Dieu qui seul peut le sonder, le convertir, le guérir.(Is6,9/Jn 12,40) Dans ce sens, le cœur est le sanctuaire de l’amour de Dieu(Rm5,5),le haut lieu de sa présence discrète et agissante. C’est le cœur de celles et ceux qui croient et qui, dans l’Esprit Saint se tournent vers Dieu en l’appelant : « Abba, Père » (Ga6,4) Ce cœur qui se réchauffe à la Parole du Christ(Luc 24,32).C’est à cette parole que la Sainte Vierge a donné tout son cœur afin de la concevoir dans son corps. Elle retenait donc ces événements dans son cœur selon toutes les richesses et ramifications sémantiques que revêt cette belle et ineffable réalité.