Homélie du XXVIII ème Dimanche du Temps ordinaire ( 14 Octobre 2018).
31 oct. 201813 &14 octobre 2018 : XXVIIIème dimanche Ordinaire B.
Sg7, 7-11Ps89/He4, 12/Mc10, 17-30.
De la richesse à la Sagesse
De la richesse de la Sagesse.
O quelle finesse !
Déconcertant ce Rabbi Jésus ! Renversant son enseignement ! De nos jours, les auditeurs diraient que c’est absolument choquant. Surtout à notre époque où l’on surveille à coup d’algorithmes complexes, les fluctuations des places boursières et les frilosités des marchés financiers, comment Jésus peut-il dire : « Mes enfants, il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’un aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu ? » (Marc 10,25) Les disciples eux-mêmes étaient déconcertés, nous dit l’évangile du jour.
Frères et sœurs bien aimés de Dieu, imaginez-vous une personne nouvellement arrivée dans nos assemblées de prières et qui écouterait ces paroles. Il faut le reconnaître : Jésus est un prédicateur coutumier des hyperboles. Rappelez-vous quand il dénonçait l’attitude des scribes et des pharisiens qui s’attachaient aux détails de la Torah en oubliant la justice et la charité. Jésus déclarait : « Vous filtrez le moucheron et vous avalez le chameau. » (Mt 23,24) Ou encore quand il révélait leur contradiction et leur hypocrisie, Jésus déclarait: « Comment peux-tu dire à ton prochain : « Laisse-moi enlever la paille de ton œil alors que la poutre qui est dans le tien tu ne la vois pas ? » (Mt 7,3-7) Pourquoi Jésus parlait-il ainsi ?
Jésus aimait réveiller les consciences, bousculer les habitudes pour appeler les hommes et femmes à la conversion. Plus encore les encourager à aller plus loin dans la quête des vertus et dans la recherche de Dieu. Il veut que chacune et chacun de nous offre le maximum de lui-même. Jésus accomplit ainsi, par toute sa vie ce que déclare l ‘auteur de l’épître aux Hébreux dans la deuxième lecture d’aujourd’hui : « Sa parole est énergique et plus coupante qu’une épée à double tranchant.» (He4, 12) Ainsi en est-il du jeune homme riche dont il est question dans l’Évangile du Jour. Il vient manifester à Jésus son désir d’avoir part à la vie éternelle. Jésus lui répond d’abord en se référant à la TORAH qu’il cite de manière particulière en y ajoutant : « Ne fais de tort à personne. » Mais le jeune homme riche ayant déclaré sa stricte observance des commandements, depuis sa jeunesse, Jésus lui dit alors : « Une seule chose te manque : va, vends ce que tu as et donne-le aux pauvres. Alors tu auras un trésor au ciel. Puis viens et suis-moi. À ses mots, il devint sombre et s’en alla tout triste. » Mais alors pourquoi ? Saint Marc répond : «Parce qu’il avait de grands biens. » Quelle contradiction ?
Avoir de si grands biens et ne pas être heureux. Parfois, il est plus facile d’être des gens de biens que des gens bien. À la vérité, ce que Jésus propose à ce jeune homme riche, c’est de faire une expérience du manque. Car ce qui lui manque, c’est que, justement il ne manque pas. Jésus l’invite à faire l’expérience heureuse de la sagesse qui permet d’acquérir la véritable liberté par rapport aux choses qui nous encombrent.
Cette sagesse que le roi Salomon dit avoir préféré à toute autre richesse comme, les trônes, la gloire, pierre précieuse, l’or, l’argent la santé et la beauté. Accepter de suivre ce chemin de Jésus, c’est devenir, non pas celui qui ne possède rien, MAIS CELUI QUE NE POSSÈDE RIEN. Car être pauvre, disait Saint Jean Paul II, ce n’est pas ne rien avoir, mais partager ce que l’on possède.
Frères, et sœurs, la voie de la sagesse, l’expérience de Jésus pour la vie éternelle, c’est moins un effort à faire qu’un don à accueillir : le don de Dieu. Or, pour accueillir, pour recevoir, il faut reconnaître qu’on manque. C’était cela qui manquait au jeune de l’Évangile. Une carafe pleine est déjà pleine : on n’y peut rien ajouter. Or la vie éternelle demande de faire confiance à Dieu : c’est la foi. De venir en aide aux pauvres, c’est la charité. Les pauvres qui nous recevront un jour au royaume des cieux : c’est l’Espérance.
Frères et sœurs bien aimés, nous ne pouvons pas méditer cette page d’évangile sans parler concrètement des pauvres. L’évangéliste saint Jean écrit : « Si quelqu’un possède les biens de ce monde, et voit son frère dans le besoin, et qu’il se ferme à toute compassion, comment l’amour de Dieu demeurerait-il en lui? » (1Jn3, 17) Mais si nous ne pouvons pas aider les pauvres (alors que nous devrions au nom même de notre religion), alors au moins ne les méprisons pas à coup de morale et de jugements hâtifs avec des « y a qu’à » et des « à quoi bon ? » Ne les méprisons pas avec des regards malveillants. Avez-vous remarqué que quatre fois dans la Parole de Dieu de ce dimanche, il est question du regard ? (3 fois dans l’évangile et une fois dans la première lecture.) Un véritable clin d’œil ! En parlant des pauvres, je pense aux mots du grand écrivain et poète anglais Gilbert Keith Chesterton qui disait : « Une preuve suffisante que nous ne sommes pas essentiellement un État démocratique, c’est que nous sommes constamment à nous demander ce que nous allons faire des pauvres. Si nous étions des démocrates, nous nous demanderions, ce que les pauvres vont faire de nous. » Au jeune riche, Jésus dit : « donne aux pauvres. » Ne dites pas que vous n’avez rien. Si vous ne pouvez donner ce que vous avez, donnez ce que vous êtes : des fils et filles de Dieu.
P. Jean Parfait CAKPO