Edito de Noël.
24 déc. 2018« Où EST L’ENFANT QUI VIENT DE NAÎTRE, LE ROI DES JUIFS ? »
Mt2, 2
Grande effervescence des préparatifs pour l’incontournable course au choix des cadeaux. Les indispensables installations de guirlandes et de sapins sans oublier les belles illuminations dans nos villes et nos campagnes. Telles sont désormais quelques-unes des caractéristiques de la solennité annuelle de la grande fête de Noël. Il n’est sans doute pas exagéré d’affirmer que dans nos sociétés postmodernes et consuméristes, le risque n’est pas moindre d’oublier l’essentiel même du message qui est au cœur de cette fête populaire. Aussi, nous est-il apparu important d’accueillir ce verset de Saint Matthieu pour la méditation et la réflexion de ce mois autour de la Naissance de Jésus. Pour les Chrétiens, en effet, Jésus est Fils de l’Homme et Fils de Dieu, mais aussi Dieu fait Homme pour qu’en lui, les hommes et femmes qui l’accueillent, deviennent fils et filles de Dieu.(Jn1,12,-14) L’évangéliste Saint Matthieu relate que quelques jours après sa naissance, des mages, des savants, des astrologues vinrent à Jérusalem poser cette question à la cour du Roi Hérode : « Où est l’enfant qui vient de naître, le roi des Juifs ? »
PRÉCISIONS CONTEXTUELLES :
L’évangéliste Saint Matthieu est le seul qui mentionne clairement cet épisode de la visite des mages à propos de la naissance de Jésus. Nous avons retenu la traduction proposée dans la version « ZeBible. » Le texte latin pourrait se traduire par : « Où est celui qui est né, le roi des juifs ? » La Bible TOB qui est une version œcuménique nous livre le verset en ces termes : « Où est le roi des juifs qui vient de naître ? » Cette traduction est identique à celle de la Bible de Jérusalem. (BJ)
AU CŒUR DE LA QUESTION :
Bien souvent, tant au-dessus qu’autour des berceaux, il y a des regards et des conversations nourries de plusieurs sentiments. Il y a surtout des interrogations. Bonne Nouvelle ! Car notre époque, comme toutes les autres se posent de nombreuses questions que nous ne devons pas esquiver .C’est ainsi qu’à la naissance de Jean-Baptiste, déjà, les voisins et les parents d’Élisabeth, sa mère se demandaient : « Que sera donc cet enfant ? » (Luc1, 66) Mais dans le cas de Jésus, la question que les mages portèrent au roi Hérode à Jérusalem et à l’assemblée des grands prêtres et des scribes (Mt2, 3-5) est : « Où est l’enfant qui vient de naître, le roi des juifs ? » Nous avons là, un véritable condensé d’éléments à résonance historique et anthropologique, prophétique et spirituelle. La question comporte à la fois, un désir de savoir, une soif de précisions, une information d’identification, une quête d’orientation et une affirmation de destination. Toutes considérations encore plus actuelles que jamais pour l’humanité.
ANALYSES SCRIPTURAIRES ET SPIRITUELLES :
« Où ?... »
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Nous savons que Jésus est né à Bethléem en terre de Juda. La raison historique est qu’il n’y avait pas de place pour eux, c’est-à-dire Joseph et Marie ainsi que l’enfant à naître, dans la salle d’hôtes. (Lc2, 7-8) Sa mère, la Sainte Vierge Marie, l’emmaillota et le déposa dans une mangeoire. Cette question ne s’arrête pas à sa naissance. À l’âge adulte, Jésus lui-même dira, à son propre sujet : « Les renards ont des terriers et les oiseaux du ciel des nids ; mais le Fils de l’homme, lui, n’a pas où poser la tête. » (Luc9, 58) En parlant ainsi, Jésus s’identifie aux plus pauvres de notre époque, aux démunis de tous les temps. Car aujourd’hui encore, « Ce sont des hommes et femmes, des enfants, des jeunes et des personnes âgées qui cherchent un endroit où vivre en paix. » (BENOÎT XVI, Pape) Il n’y avait pas de place pour le DIVIN ENFANT. Ce qui fait écrire à Saint Jean dans le Prologue: « Il est venu dans son propre bien et les siens ne l’ont pas accueilli. » (Jn1, 11)
« Où ?... »
Par cette question, les savants visiteurs, voulaient à la fois connaître le lieu de sa naissance mais aussi vérifier l’authenticité des signes à déchiffrer dans les astres du ciel qu’ils avaient vus. Cette quête avait obligé tous les grands prêtres et les scribes à relire les prophéties, les textes sacrés. (Mt2, 4-6) Il y a là un message pour tous ceux et celles qui cherchent à connaître Jésus. Il importe de se laisser instruire, éclairer, guider par les textes sacrés. Jésus leur donne une vivacité et une vitalité nouvelles. D’ailleurs, la Réforme du Concile Vatican II le signifie clairement en ces termes : « La force et la puissance que recèle la parole de Dieu sont si grandes qu’elle constitue, pour l’Église son point d’appui et sa vigueur, et pour les enfants de l’Église, la force de leur foi, la nourriture de leur âme, la source pure et permanente de leur vie spirituelle. » (Vatican II, Dei Verbum, N°21)
« Où ?... »
La question se pose toujours, plus de deux mille ans plus tard. Puisque sa Nativité est fêtée tous les ans, il nous est bon, à temps et à contretemps, de se la reposer en sachant que, comme il l’avait promis : « là où deux ou trois sont réunis en son nom, Jésus est là au milieu d’eux. » (Mt18, 20) N’oublions pas que l’autre nom de Jésus, Emmanuel (Immânû’él) signifie : « Dieu avec nous » (Is7, 14)
Jésus est donc toujours là, partout où des chemins de fraternité s’ouvrent, des actes de générosité, de pardon ,de justice et de paix se manifestent pour donner aux fils et filles de la Terre, la joie de vivre dans la dignité. Car lorsque Saint Jean résume la mission du Christ, il écrit ceci : « Je suis venu pour qu’ils aient la vie et qu’ils l’aient en abondance. » (Jn10, 10) D’ailleurs, c’était l’une des responsabilités fondamentales du Roi. Le roi autrefois était tenu, grâce à sa fonction et sa consécration de garantir les sécurités du peuple : sécurités foncières, nourricières, vitales et sociales. Il n’est pas anodin que Jésus soit né à Bethléem qui signifie, littéralement, « la Maison du Pain ». Plus encore, à la fin de sa mission, il s’est donné comme « Pain Vivant descendu du Ciel. » (Jn6, 34-36)
Jésus est Roi Serviteur, Roi Protecteur, Roi Pasteur, Roi Sauveur, Roi Libérateur.
À vrai dire, plus libérateur et pasteur que roi, plus serviteur et protecteur que roi.
« Il EST ROI DES JUIFS, LE DIVIN ENFANT »
Parfois, la fin est déjà dans le commencement. Le destin de Jésus en donne l’illustration. Lors de sa fin tragique et sa mort ignominieuse sur la Croix, une polémique éclate entre les grands prêtres et le gouverneur Ponce Pilate. En effet ce dernier avait apposé au sommet de la Croix de Jésus cet écriteau : « Jésus, le Nazôréen, le roi des juifs. Cet écriteau, bien des juifs le lurent, car l’endroit où Jésus avait été crucifié était proche de la ville, et le texte était écrit en hébreu, en latin et en grec. Les grands prêtres des juifs dirent à Pilate : « N’écris pas ‘le roi des juifs’ mais bien cet individu a prétendu qu’il était le roi des juifs. Pilate répondit : ce que j’ai écrit, je l’ai écrit » (Jn19, 19-21) Les mages l’avaient ainsi nommé. Si nous n’oublions pas que Jésus est roi, nous ne devrions jamais oublier non plus qu’il est Juif et que nous sommes membres de son corps mystique, de la même origine, comme dit l’épître aux Hébreux, et qu’il n’a pas honte de nous appeler ses frères et sœurs.(He2,10-12 .Mt12,46-50,Ga3,26-29) Pour cela, la fête de Noël nous invite tous à un véritable déplacement intérieur, un changement des cœurs et des regards, des attitudes et des mentalités pour une spiritualité de l’enfance sans égoïsme, sans orgueil : Pour voir le Royaume de Dieu, il nous faut l’accueillir comme un enfant. (Lc18, 16-17)
Sur les épaules de l’avenir
Cherche encore à se maintenir
Le regard voyageur des cœurs
Questionneurs de toutes hauteurs.
Naître ou renaître
Et de qui
Et de quoi
Ce n’était pas une question
C’est une maturation
Sur les visages et leur mystère
Peine toujours à se faire
L’harmonie de l’existence
Exigeant temps et distance
Renaître ou connaître
Mais d’où donc
Mais par qui donc
Ce n’était pas une question
C’est une proposition
Connaître ou reconnaître
De naître à l’Être
De n’être pas à naître pour
Pour qui
Pour quoi
C’est plus qu’une question
C’est une Incarnation.
Père Jean-Parfait CAKPO