«L’ESPRIT SAINT ET NOUS-MÊMES … » Actes 15,28
13 oct. 2021«L’ESPRIT SAINT ET NOUS-MÊMES … » Actes 15,28
Elle est complète et complexe ; elle est célèbre et dense, cette formule qui fait le titre de notre Bulletin de ce mois d’octobre. Sa source remonte au premier siècle du christianisme. C’est l’histoire des commencements de l’Église et de sa Mission de proclamation de l’Évangile de Jésus Christ, Fils de Dieu, Sauveur des hommes et femmes de toutes les Nations. (Mt28, 19/Marc1, 1) Progressivement, le message chrétien s’est diffusé, en Samarie puis en Asie Mineure. D’ailleurs, Jésus avait donné à ses Apôtres, avant son Ascension comme une « Feuille de route » en ces termes : «Vous recevrez une force quand le Saint Esprit descendra sur vous. Vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’au bout du monde.» (Ac1, 8) Il est évident à la lecture de ce verset que le rôle inaugural et principal est absolument dévolu à l’Esprit Saint. Lui qui est descendu sur eux à la Pentecôte. (Ac2, 1-13)
CONTEXTE.
Il nous est important de savoir qu’à l’époque de ce verset les Chrétiens vivaient dans un contexte multiculturel où ils étaient minoritaires. Le Livre des Actes des Apôtres permet d’accueillir et de méditer comment nos aînés dans la foi, il y a plus de 2000 ans, ont vécu au quotidien la Bonne Nouvelle. Ce n’était pas une sinécure. Loin s’en faut! Il fallait accueillir toutes et tous, des frères et sœurs venus de divers milieux ; organiser les communautés d’Église; annoncer le Christ; gérer l’hostilité croissante des autorités civiles, politiques, religieuses d’alors, et l’incompréhension de la société; Il fallait encourager celles et ceux qui étaient persécutés, sans oublier de gérer les conflits…etc (Ac4,1-22/ 5,17-37) Justement, le verset que nous méditons en cette lettre édito nous vient d’une situation conflictuelle mais en interne. De quoi s’agit-il ?
«Certaines gens descendirent alors de Judée, qui voulaient endoctriner les frères : « Si vous ne vous faites circoncire selon la règle de Moïse, disaient-ils, vous ne pouvez pas être sauvés. » Un conflit en résulta, et des discussions assez graves opposèrent Paul et Barnabas à ces gens. » (Ac15, 1-2)
CONSULTATIONS. RÉSOLUTIONS. DÉCISIONS.
Une délégation fut alors formée pour un dénouement du conflit. Elle était composée de Paul et Barnabas, ainsi que de quelques membres de l’Église d’Antioche. Ils furent envoyés à Jérusalem auprès des apôtres Pierre, Jacques et quelques anciens « à propos de ce différend. »(Ac15, 1-2) À Jérusalem, les discussions étaient vives avec des prises de positions argumentées entre ceux qui étaient résolument attachés à imposer aux païens nouvellement convertis au christianisme, les prescriptions de la Loi de Moïse d’une part et ceux qui, d’autre part, estimaient « qu’il ne fallait pas accumuler les obstacles devant ceux des païens qui se tournent vers Dieu.» (Ac15, 19)Au bout de ces consultations, décisions furent alors prises par les Anciens, les apôtres et toute l’Église, d’envoyer une délégation à Antioche, d’écrire une lettre aux communautés qui sont à Antioche, en Syrie, et en Cilicie pour clarifier l’originalité du Message de Jésus. C’est au début de ce célèbre document que se trouve cette belle et magnifique affirmation: « L’Esprit Saint et nous-mêmes, nous avons en effet décidé de ne vous imposer aucune autre charge que ces exigences inévitables.» (Ac15, 28)
LUMIÈRES POUR TOUS JOURS.
Deux réalités me paraissent, ici, indubitablement fondatrices de ces débuts de l’Église dans ce verset:
la première, c’est: « l’Esprit Saint. »
La deuxième, c’est: « Nous. »
Étymologiquement, Église vient du grec Ekklèsia, pour traduire l’hébreu qâhal pour signifier : Assemblée du peuple, Convocation sainte du Peuple; Peuple de Dieu. Communauté d’hommes et de femmes invités par Dieu. Ainsi, dès le départ, les Chrétiens ont pris conscience d’appartenir à une assemblée dont les fondations et la clé de voûte sont l’œuvre de Dieu, dans le Christ, par l’Esprit Saint. D’où, l’expression: « l’Esprit Saint et Nous… »
« Nous », car l’Église est communion et non pas un conglomérat d’individualités affirmées. C’est d’ailleurs ce qui faisait écrire joliment à Charles PÉGUY:
« Il faut se sauver ensemble.
Il faut arriver ensemble chez le Bon Dieu.
Il faut se présenter ensemble.
Il ne faut pas arriver trouver le Bon Dieu les uns sans les autres.
Il faudra revenir tous ensemble dans la maison de notre père.
Il faut aussi penser un peu aux autres.
Qu’est-ce qu’il dirait si nous arrivions, si nous revenions les uns sans les autres ? » (Le Mystère de la charité de Jeanne d’Arc.)
« Nous » car communion, participation et mission constituent le moteur de la vigueur renouvelée de l’Église à travers les âges.
« Nous » car comme l’enseigne Saint Augustin, de Carthage: « Dieu qui nous a crées sans nous, ne veut pas nous sauver sans nous. »
« Nous » car évangéliser, c’est l’œuvre de toutes et tous les fidèles de Jésus. Cela nous permet de comprendre l’initiative du Pape François pour une démarche synodale 2021-2022 dont le thème est les étapes figurent dans ce bulletin. Nous sommes toutes et tous concernés. Appelés à dialoguer, à écouter et à comprendre ce que veut l’Esprit Saint pour l’avenir de l’Église universelle. Mais le Pape a déjà précisé dans son discours à Bratislava en Slovaquie ceci: « L’Eglise n’est pas une forteresse, une puissance, un château fort situé en hauteur qui regarderait le monde avec distance et suffisance. L’Église est une tente. Le centre de l’Église n’est pas l’Église. Sortons de l’inquiétude excessive de nous-mêmes, pour nos structures, pour la façon dont la société sympathise avec nous. » (13 septembre 2021)
« Nous » enfin car quelqu’un œuvre indéfectiblement avec tous les hommes et femmes de toutes tribus langues peuples et nations (Ap5, 9) qui ont foi en Dieu. Il s’appelle l’Esprit Saint, Paraclet.
Il est l’Auteur et l’Acteur de la Mission universelle de l’Église.
Il est source de créativité, force du bénévolat et grâce de l’apostolat. Il est don suprême du Père et du Fils. L’esprit Saint. Il est la Divine Fontaine intarissable, que le Seigneur creuse en chacune et chacun de nous pour abreuver nos âmes, purifier nos cœurs, désaltérer nos envies, apaiser nos esprits, motiver notre volonté, guérir nos blessures, laver nos souillures, clarifier nos visées, orienter nos visions, défendre nos vies. En cette période de crises multiples, il est bénéfique de méditer ce verset pour la vie.
« Vous n’avez qu’à faire confiance à la Vie : la Vie vous fera monter, si seulement vous avez soin de choisir, dans le labyrinthe des événements, les influences ou les chemins qui sont susceptibles, à chaque fois de vous mener un peu plus haut. » (Teilhard de Chardin, Croître, 16 janvier 1939)
Père Jean-Parfait CAKPO
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