De merveilleux repas que fit saint François avec sainte Claire à Sainte-Marie des Anges.
11 sept. 2022Fioretti de St François d’Assise
De merveilleux repas que fit saint François avec sainte Claire à Sainte-Marie des Anges
Quand saint François se trouvait à Assise, il visitait souvent sainte Claire, lui donnant de saints enseignements. Et elle avait un très grand désir de manger une fois avec lui et, pour cela l'en priait bien des fois ; mais lui ne voulait jamais lui donner cette consolation. D'où, ses compagnons, voyant le désir de sainte Claire, dirent à saint François : "Père, il nous semble que cette rigueur n'est pas selon la divine charité, que tu ne veuilles exaucer soeur Claire, vierge aussi sainte et aimée de Dieu, en une si petite chose que celle de manger avec toi ; et spécialement considérant qu'à ta prédication elle abandonna les richesses et les pompes du monde. Et en vérité, si elle te demandait une grâce plus grande encore que celle-là, tu devrais l'accorder à ta plante spirituelle".
Alors saint François répondit: "Vous semble-t-il que je doive l'exaucer?" Et les compagnons: "Oui, Père, c'est une chose juste que tu lui fasses cette consolation". Alors saint François dit : "Dès lors qu'il vous le paraît à vous il me le paraît aussi. Mais afin qu'elle soit plus consolée, je veux que ce repas se fasse à Sainte-Marie des Anges; parce qu'il y a longtemps qu'elle est recluse à saint Damien; de sorte que, le couvent de Sainte-Marie où elle eut les cheveux coupés et où elle fut faite épouse de Jésus-Christ, la réjouira un peu; et ici nous mangerons ensemble au nom de Dieu".
Le jour choisi pour cela étant donc arrivé, sainte Claire sortit du monastère avec une compagne ; et escortée des compagnons de saint François, elle vint à Sainte-Marie des Anges. Elle salua dévotement la Vierge Marie devant son autel où elle avait eu les cheveux coupés et avait reçu le voile, puis ils la menèrent voir le couvent jusqu'à ce qu'il fût l'heure de dîner. Et pendant ce temps, saint François fit préparer la table sur la terre, comme c'était l'usage. E quand fut venue l'heure du dîner, ils s'assirent ensemble, saint François et sainte Claire, et un des compagnons de saint François avec la compagne de sainte Claire, et puis tous les autres se mirent à table humblement.
Et au premier mets, saint François commença à parler de Dieu si suavement, et si hautement et si merveilleusement que, l'abondance de la grâce divine descendant sur eux, ils furent tous ravis en Dieu. Et pendant qu'ils étaient ainsi ravis, les yeux et les mains levés vers le ciel, les gens d'Assise et de Bettona et ceux de la contrée environnante voyaient que Sainte-Marie des Anges et tout le couvent et le bois, qui était alors à coté́ du couvent, brulaient entièrement et il leur semblait que c'était un grand feu qui occupât à la fois la place et de l'église et du couvent et du bois. Ce pourquoi, les gens d'Assise coururent là-bas en grande hâte pour éteindre le feu, croyant fermement que tout brûlait. Mais arrivant au couvent et ne voyant aucun feu, ils y entrèrent et trouvèrent saint François avec sainte Claire et tous leurs compagnons ravis en Dieu dans la contemplation et assis autour de cette humble table. De cela, ils comprirent avec certitude que c'était là un feu divin et non matériel que Dieu avait fait apparaître miraculeusement pour démontrer et signifier le feu de l'amour divin dont brûlaient les âmes de ces saints frères et saintes moniales. Aussi, ils repartirent le cœur rempli d'une grande consolation et saintement édifiés. Puis, après un grand moment, saint François et sainte Claire revinrent à eux en même temps que les autres et se sentant si bien réconfortés par la nourriture spirituelle, ne se soucièrent point de la nourriture corporelle.
Et ainsi, ce repas béni étant terminé, sainte Claire, bien accompagnée, retourna à saint Damien. De quoi, les soeurs eurent, en la voyant, grande allégresse; car elles craignaient que saint François ne l'eût envoyée gouverner quelque autre monastère, comme il avait déjà envoyé soeur Agnès, sa sainte soeur, gouverner comme abbesse le monastère de Monticelli de Florence. Et saint François, quelque autre fois, avait dit à sainte Claire: "Tiens- toi prête, que je puisse t'envoyer en quelque couvent, s'il en était besoin"; et elle, en fille de la sainte obéissance, avait répondu : "Père, je suis toujours prête à aller partout où vous m'enverrez". C'est pourquoi les sœurs se réjouirent beaucoup, quand elles la revirent ; et sainte Claire, dorénavant, demeura très consolée.
A la louange du Christ. Amen.