Retour sur le Café Théo du Samedi 29 Juin 2024
Animé par Marie-Christine HUAU
 
"L'eau, source de cultures, ressource de consciences"
 
Père Jean Parfait CAKPO présente le dernier Café Théo de l'année pastorale. Il rappelle que le Café Théo de notre paroisse a vu passer beaucoup de thématiques, pas forcément enfermées dans des considérations chrétiennes ou dogmatiques.
Il remercie Marie-Christine HUAU qui est une grande spécialiste de l'eau ; l'eau qui révèle quelque chose de nous-mêmes. Nous sommes doublement des enfants de l'eau, en tant que chrétiens baptisés dans l'eau, et parce que notre corps est composé à plus de 60% d'eau.
 
L'eau est de nature, mais aussi de culture. Marie-Christine HUAU  nous propose un voyage dans l'eau, en remontant à la genèse des grandes civilisations, en essayant de brasser tous les continents.
 
Et tout d'abord, savons-nous que la civilisation romaine s'est faite à travers l'eau, que Rome est née par l'eau ? Rome, zone marécageuse du Tibre, gorgée d'eau, entourée de 7 collines, choisie par Romulus pour s'y établir. Les romains vont créer des compluvium pour recueillir l'eau de pluie, des impluvium pour la capter et la stocker, des aqueducs pour la transporter, des châteaux d'eau, des égouts pour évacuer les eaux usées. La fonction hygiénique satisfaite, est venue la notion de plaisir et la création des bains et des thermes. L'eau a également permis la conception de spectacles d'eau appelés les naumachies (reconstitution de combats navals). Et bien sûr les nombreuses fontaines de Rome. Sans eau, la culture romaine ne se serait pas développée de la même manière.
 
L'eau est aussi à l'origine de la naissance des mystérieux Jardins suspendus de Babylone, cité antique de Mésopotamie (entre le Tigre et l'Euphrate, à peu près l'actuel Irak). Les babyloniens se sont développés sur le bord du fleuve Euphrate et ont construit des digues pour se protéger des crues du fleuve. L'irrigation des terres fertiles a été rendue possible par l'édification de canaux, permettant l'agriculture.
 
Mais les pays d'Afrique du Nord n'ont pas la chance de bénéficier de la proximité d'un fleuve. Comment vivre dans le désert ? Dans ces pays qui ne reçoivent que de faibles précipitations, sous le sable, la vie est présente (rampants, petites sources, nappes phréatiques ...). Les marocains, suivis par d'autres peuples, ont eu l'idée d'utiliser ces petites sources pour vivre. De là sont nées les oasis entièrement crées par l'homme : trois étages de cultures avec tout d'abord un grand palmier dattier produisant un microclimat, et sous sa protection des arbustes et au-dessous des plantes basses.
A Marrakech, aux confins de l'Atlas, il y a des nappes phréatiques à quelques dizaines de mètres sous le sol. Il existe au Maroc des "khettara",  un système traditionnel de drainage des eaux souterraines, dont il ne subsiste que peu d'exemplaires aujourd'hui. La culture marocaine est une culture de la sobriété, conscience de la valeur de l'eau oblige !
 
Prenons un exemple français de ce que l'eau peut apporter à la culture : le Château de Versailles. Peut-on imaginer ses jardins sans les Grandes Eaux jaillissant de ses 55 fontaines ? Une réalisation qui a nécessité le concours des meilleurs ingénieurs hydrauliciens d'Europe. L'innovation hydraulique la plus spectaculaire, la machine de Marly, destinée à acheminer l'eau de la Seine à Versailles, est due à un ingénieur belge. Aujourd'hui encore, les Grandes Eaux distinguent Versailles des autres châteaux.
Mais ce modèle d'ingéniosité a représenté un tiers du budget du château : le chantier de la démesure.
 
Autre exemple de transformation due à l'eau : Marseille. La construction du canal qui amène les eaux de la Durance, au XIXème siècle, a transformé cultures et paysages. Les quartiers de Marseille se sont spécialisés un à un par culture. Ces changements ont métamorphosé à la fois l'arrière-pays et la ville.
 
Plus loin, au Cambodge, la Cité d'Angkor, avec ses canaux et réservoirs pour recueillir et stocker l'eau, fut une merveille esthétique et technique. Pourtant les crues et les moussons ont eu raison des temples comme des aménagements hydrauliques, causant la perte de la cité.
 
Quelques mots sur le Sénégal. Le fleuve Sénégal est l'un des rares fleuves au monde à faire l'objet d'une convention entre les pays qui le bordent, pour sa protection et sa mise en valeur. Ceci dans un pays de culture agraire, où l'eau est essentielle.
 
Marie-Christine HUAU a aussi évoqué une technique agricole ancestrale dans les terres désertiques comme le Sahel : le Zaï. Schématiquement : en période sèche on creuse de petits trous dans lesquels on met de l'humus, quelques grains de sorgho et un peu de terre ; à l'arrivée des maigres pluies, avec l'aide involontaire des termites, le système racinaire se développe, de jeunes pousses apparaissent.
 
Ainsi, les pays du Nord et les pays du Sud appréhendent l'eau différemment selon la géographie et le climat.
L'eau est aussi une arme de guerre [en Ukraine, au Moyen-Orient, en Egypte / Soudan / Ethiopie (pour le Nil)].
 
L'équilibre et la conscience que les décisions d'aujourd'hui produiront leurs effets dans plusieurs dizaines d'années doivent guider nos choix.
 
 
E.G.
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